Nous revenions souvent sur la question de l’effet positif que joue le fait que les apprenants puissent s’exprimer souvent et librement.
« On ne comprend vraiment bien que ce que l’on s’explique à soi-même ». Nous étions tous d’accord pour penser que, derrière son apparence un peu tautologique, cette phrase exprimait une vérité très utile.
Un jour, laissant glisser cette pensée, nous l’avons reformulée en une autre qui nous parut encore plus convaincante : « La meilleure façon de comprendre quelque chose, c’est de l’expliquer à d’autres. C’est alors que, ce qu’on ne fait, peut-être, qu’entrevoir, peut devenir tout à fait clair. »
Permettre à quelqu’un d’expliquer, c’est lui permettre de comprendre.
Mais cette liberté n’avait-elle pas un autre avantage ? Chacun ayant la possibilité de dire comment il voit ou comprend les choses, le groupe pouvait entendre plusieurs explications ou formulations différentes.
Nous voyions aussi un très grand mérite au fait que les apprenants n’adressent pas leurs explications, questions ou remarques au seul éducateur, mais à tous les membres du groupe. Lorsque celles-ci sont adressées à l’éducateur, tout le monde s’attend à ce que ce soit lui qui réponde, qui juge ou qui tranche. Personne n’est incité à réagir. Lorsque les élèves se les adressent les uns aux autres, tous se sentent interpellés et ils réagissent volontiers ; d’autant plus qu’ils ressentent ce qui est dit par des condisciples comme, par nature, plus « discutable » que ce qui est dit par l’éducateur dont les affirmations sont très souvent perçues comme se terminant par un invisible mais catégorique « point final » qui décourage toute discussion.
Nous en avons conclu qu’il fallait que l’enseignant rompe autant que possible la relation spontanée et presque exclusive qui unit chaque apprenant à sa personne, pour favoriser des liaisons de chacun avec chacun et de chacun avec tous, éducateur compris. Nous pensions que le fait que les apprenants voient dans chacun des autres apprenants autant de sources possibles d’informations et d’explications, était très désirable.
La multiplicité des formulations, des explications, des interventions, même très courtes, favorise forcément l’apprentissage.